Éducation à Mayotte : état des lieux des écoles et des infrastructures
Bien que Mayotte soit désormais un département français d’outre-mer, l’île fait face à des problématiques très éloignées de celles de la métropole. L’une d’entre elles est liée à la jeunesse et à la forte croissance démographique de sa population, qui pèse sur les infrastructures scolaires existantes. Les établissements déjà en place ont du mal à répondre aux besoins d’une population scolaire en constant développement, laissant entrevoir un grand décalage entre les capacités actuelles et les besoins futurs du secteur éducatif local.
Une insuffisance chronique des infrastructures et des effectifs scolaires
Les infrastructures scolaires constituent une priorité pour le gouvernement français, qui s’efforce de venir à bout du problème.
La vétusté des locaux, l’insuffisance des équipements et des fournitures, ainsi qu’un manque flagrant de matériel, impactent directement le bon fonctionnement du secteur. La plupart des écoles présentent de nombreux défauts : bâtiments mal entretenus, manques d’accès aux sanitaires ou non-conformité aux normes de sécurité.
En outre, l’inadéquation avec le nombre d’élèves accueillis est criante. Plus de cinquante élèves par enseignant n’est pas rare dans les salles de classe. Près de 117 000 élèves sont actuellement inscrits dans 234 établissements scolaires (186 écoles maternelles et élémentaires, 22 collèges et 11 lycées) sur l’île.
La population scolarisée a pourtant grimpé en flèche ces dernières années et ne cesse d’augmenter aujourd’hui ! Portée par la forte croissance démographique de l’île – qui fait face à un flux migratoire croissant –, Mayotte présente une population jeune : les habitants âgés de 3 ans à 16 ans représentent 36,3 % de la population totale (soit environ 130 000 personnes). L’explosion des effectifs scolaires à Mayotte exerce une réelle pression sur les infrastructures déjà précaires. Aujourd’hui, la disparité est telle que certaines zones sont quasiment dépourvues d’établissements adaptés aux enfants scolarisables. Les zones rurales sont particulièrement concernées par ce phénomène, obligeant parfois les élèves à se déplacer sur plusieurs kilomètres pour rejoindre leur école.
Face à cette situation préoccupante, le gouvernement a déployé des solutions temporaires pour accueillir dans des conditions acceptables les jeunes scolarisables tels que l’installation de classes mobiles ou le recours à des préfabriqués.
Mais ces mesures restent insuffisantes pour faire face au nombre croissant d’enfants non scolarisés. Le taux élevé de non-scolarisation actuelle en âge d’obligation scolaire – compris entre 5 379 et 9 575 enfants – témoigne de l’urgence de la situation. Le manque d’infrastructures s’accompagne aussi d’une insuffisance importante en moyens humains : au primaire, 20 % seulement des enseignants sont titulaires tandis qu’au secondaire cette proportion monte à seulement 45 %. Il devient dès lors urgent d’engager des investissements conséquents pour construire de nouvelles structures scolaires et rénover celles déjà existantes afin d’offrir aux élèves un véritable environnement propice à l’apprentissage.
Les conséquences des catastrophes naturelles sur le secteur éducatif
Mayotte n’échappe pas aux catastrophes naturelles, avec des conséquences directes sur le secteur éducatif.
Les cyclones et les fortes pluies, typiques de cette zone, occasionnent régulièrement des dégâts considérables sur les infrastructures scolaires.
Ainsi, le cyclone Chido a soufflé avec des vents allant jusqu’à 230 km/h : 40 % des établissements ont été endommagés. Toitures arrachées, classes inondées, coupure d’électricité… Les écoles se sont retrouvées dans l’incapacité d’accueillir les élèves et assurer la continuité pédagogique. De ce fait, 27 % des établissements ont dû accueillir des sinistrés entraînant le décalage de la rentrée au 13 janvier, mais 115 000 jeunes sont retournés en classe depuis le 27 janvier 2025.
Ces événements climatiques aggravent les difficultés déjà présentes en matière de gestion du système éducatif. Les fermetures d’écoles pour des raisons de sécurité deviennent une fatalité entraînant inévitablement des ruptures dans les parcours scolaires. La perte de matériel pédagogique et la destruction d’infrastructures sont autant de freins à l’apprentissage qui nécessitent de répondre efficacement et rapidement afin de ne pas pénaliser durablement les enfants. C’est pourquoi, lors de ces événements récents, 130 palettes de matériel scolaire et kits solaires ont été distribuées même si tensions sociales et grèves ont éclaté pour dénoncer le manque de moyens.
Ainsi, il est essentiel aujourd’hui de renforcer les infrastructures scolaires afin qu’elles résistent aux aléas climatiques. Ceci passe par un relèvement du niveau des normes de construction, mais également par l’intégration de dispositifs dédiés à la prévention et à la gestion des crises. Une attention toute particulière doit être apportée à la formation des enseignants et du personnel scolaire afin qu’ils soient capables d’intervenir lors d’une situation d’urgence.
Voici quelques mesures essentielles à envisager :
- Évaluer fréquemment les infrastructures scolaires de l’île pour en cerner les points durs.
- Développer des systèmes d’alerte précoce pour informer les communautés scolaires des risques liés aux phénomènes climatiques.
- Renforcer les partenariats avec les organisations humanitaires pour assurer un soutien rapide en cas de catastrophe.
- Promouvoir la formation continue des enseignants sur les méthodes d’enseignement adaptées à la reprise en main pédagogique post-catastrophe.
- Mise en place, dans les établissements scolaires, de centres d’accueil temporaire pour réduire l’impact de la catastrophe sur la scolarité des élèves.
En mettant en œuvre ces stratégies, il sera possible d’atténuer les conséquences dévastatrices des catastrophes naturelles sur l’éducation et de garantir un environnement d’apprentissage plus sûr et plus durable pour les élèves de Mayotte.
Réactions et enjeux pour l’avenir de l’éducation à Mayotte
À l’évidence, les réactions des autorités locales comme nationales sont déterminantes quant à l’avenir de l’éducation à Mayotte.
Des plans d’urgence ont été mis en place pour essayer d’enrayer la situation, mais ils ne suffiront pas sans un investissement sur le long terme et des moyens financiers importants en face. Un préavis de grève a été déposé et des manifestations ont eu lieu, avec la FSU plaçant en priorité la rescolarisation et la continuité pédagogique. Un projet de loi d’urgence est actuellement en discussion pour transférer la responsabilité des travaux à l’État.
Pour les acteurs de l’éducation, il est important qu’une réponse concertée soit trouvée rapidement, en passant notamment par une approche participative impliquant non seulement les institutions publiques mais aussi les communautés locales. Les parents d’élèves, les enseignants, les associations doivent avoir leur place dans le dispositif décisionnel afin de répondre aux besoins réels du terrain. L’engagement du gouvernement dans le retour à un fonctionnement normal, avec la prise en charge financière des personnels éprouvés par cette crise et une politique ambitieuse pour le secteur éducatif mahorais est également un préalable nécessaire. C’est cette articulation qui constitue sans doute une des clés de l’amélioration dans la durée du système éducatif mahorais.
Pour relever ces enjeux, l’avenir de l’éducation à Mayotte passe donc par une refonte totale du système éducatif. Il faut innover sur le plan pédagogique, améliorer les conditions de travail des enseignants et réduire les inégalités entre les différentes zones géographiques de l’île. En investissant massivement dans son éducation, Mayotte pourra offrir un meilleur avenir à ses jeunes tout en favorisant la cohésion sociale et le développement économique de son territoire. La mise en place d’une véritable politique volontariste en matière d’éducation et une réponse rapide aux catastrophes constituent une urgence absolue.